Marionnettes

Marionnettes

C’est le vent qui soufflait fort ce soir sur la lande
Qui a emporté au loin mes plaintes et ma demande
Lorsque j’ai déclamé debout face aux bourrasques
Cet amour qui grandit à l’abri de mes masques.

Car je n’ai pas le droit de braver l’interdit
Qui fait de moi et d’elle de ces êtres maudits
Que le sort a marqué de sa patte infâme
En leur interdisant de paraître homme ou femme.

Depuis ma tendre enfance ce qu’on a fait de moi
Un serviteur d’un dieu qui ne parle qu’à moi
Et ce qu’on a pour elle décidé une fois
Qu’elle serait vestale à l’abri des émois.

Lors nous portons costumes dans les cérémonies
Nous avons pour coutume d’être toujours munis
De ces masques effrayants pour donner aux fidèles
La crainte de leurs dieux, dont nous sommes modèles.

Nous vivons détachés, isolés et lointains
De toutes ces bassesses dont nous avons dédain
Nous lisons dans les livres mille et une prières
A répéter sans cesse sous de pauvres lumières.

Mais voilà je l’ai vu, son doux visage d’ange
Son masque était posé et alors chose étrange
J’ai ressenti en moi quelque chose qui change
Rien dans ce que je vis alors ne me dérange.

La conscience me vint que je n’étais qu’un homme
Je ne me voyais pas jusqu’alors comme tel
Il a fallu qu’un jour survienne comme une gomme
La vision de cet ange pour m’ouvrir grand le ciel.

Tous les soirs depuis lors je me rends sur la lande
J’y crie fort mon amour, le désir qui s’élance
Et presque soulagé ensuite je me tance
Je sais qu’il n’y a d’espoir à ma folle attente.

Pierre-Jean BOUTET
cambredaze.canalblog.com