Je me fonds

Je me fonds

Je suis la lente caravane engluée misérable dans les sables du temps

Je me perds comme en rade, échoué lamentable sur les rives des vents

Je reste en suspens comme entre deux âges, ravagé immobile et pourtant impatient

Je ressens le passage obstiné, incessant, de vagues successives de fragiles instants.

Où sont passés les gens, et les choses, les moments

Où sont enfuis tous ceux qui vivaient en ce temps ?

Pourquoi ont disparus tous les amours d'antan

Pourquoi donc sont partis, absents dorénavant ?

Je m'enfouis dans le sable, déconnecté, lointain, que m'importe à présent et les bruits et l'argent

Je plonge dans les limbes d'improbables nuages, que me chaud maintenant le réel, le présent ?

Je veux y oublier les chagrins et les peines, indifférent , et me fondre à jamais dans les brumes de sang

J'essaie de n'être plus qu'une ombre dans la plaine, balayé, balloté par les assauts des vents.

Où sont allés les foules, les héros et les lâches

Où sont partis tous ceux tant aimés ou haïs

Pourquoi donc ne sont plus tous ceux qui ont failli

Pourquoi ne parlent plus ceux qui étaient à la tâche ? 

Je m'évade en volant par dessus les nuées, chevauchant des écharpes sur les vifs alizés

Je m'abstrais de ces temps en fumées indolentes, s'élevant paresseuses dans les cieux étoilés

Je dissipe mon corps dans les pluies, dans les cendres de ces volcans éteints et soudain ranimés

Je dissous mon essence dans les eaux raffinées qui jaillissent des sources comme en fines coulées.

Pierre BOUTET

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